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Le projet Hadopi finalement "Hadopté"

Caterogy : droits des internautes, written at 2008-11-05 10:55:29 by Troll.

Le projet de loi "Créations et Internet" très largement décrié de toutes parts et par tous les partis depuis le début de son périple a finalement réussi vendredi dernier, sous la pression de l'éternelle ministre de la Cultre Christine Albanel, a franchi la première et plus dure étape qui mènera certainement à son acceptation finale.


« Qu'il ne soit pas dit qu'en France on écoute pas l'avis du peuple ! En effet mieux encore, on représente le peuple ! Nous les ministres et députés savons ce qui est bon pour lui et ce qu'il pense, d'ailleurs nous le savons mieux que la Commission Européenne. »

Voici un bref résumé du discours de Christine Albanel depuis maintenant plusieurs mois pour pouvoir passer son fameux et chéri projet de loi "Créations et Internet", très vite surnommé le "Projet Hadopi".


Retour sur les faits



Un projet vivement décrié



Le projet Hadopi n'en est pas au stade d'être présenté au grand public, cela fait déjà longtemps que celui-ci a été présenté, et depuis, à part l'industrie de la musique, communément appelé « les ayant droit »(non ce ne sont pas les artistes) ou « les majors », tout le monde s'est toujours dressé contre ce projet.

Le dernier en date été le parlement européen, qui avait clairement voté contre ce projet de loi à la très large majorité (environs 500 voix contre et une soixantaine pour), Albanel avait alors qualifié ce vote « d'erreur » (SIC) puisque d'après elle les députés européens, qui ont pourtant voté contre ce projet pour la deuxième fois n'auraient pas bien compris le projet ou l'aurait « mal lu » (NLDR : ou comment les qualifier d'écervelés).

Avant cela, membres de son parti ou membres de l'opposition, tous quasiment avaient également fini par comprendre que ce projet de loi ne mènerait à rien et l'avait abandonnée dans sa quête ultime et folle du projet Hadopi.

Avant cela, la CNIL (défaut de proportionnalité), l'ARCEP (donnons du temps au temps, problème technique), l'ISOC (liberticide), le Conseil d'État (plusieurs volets de critiques), mais également l'association ASIC constituée des acteurs du web les plus influents (Google, Yahoo!, Microsoft, etc. ) et bien sûr les associations militantes telles que l'UFC-Que Choisir et la Quadrature du Net avaient tous apporté des arguments contre cette loi.

Le Conseil d'Etat lui-même a désaprouvé par plusieurs fois ce projet de loi, qualifié par certains politiques français et européen de « grand n'importe quoi » et de « gâchis de l'argent du contribuable » car en effet alors que la CNIL (qui a d'ailleurs torpillé tant qu'elle le pouvait ce projet) manque de soutien financier et voit son budget se réduire chaque année, la mise en place de l'Hadopi coûterait 6.5 millions d'euros par an, sans compter les procédures de traque des internautes etc. .

Le projet Hadopi en bref



Il est bon de rappeler pourquoi tout ce remou autour d'un projet de loi et cette mobilisation de toutes parts pour se lever contre.

Le projet de loi Hadopi s'ajoute à la loi sur la riposte graduée et l'intègre même mais y ajoute des termes considérés comme inacceptables par de nombreux partis : concrètement, dans le but de contrer le piratage (mais pas complètement, d'après Albanel, juste 70% suffiront) une traque automatisée des fraudes au téléchargement illégal sera effectuée sur les réseaux d'échange de pair à pair.

Jusque-là rien de bien nouveau, mais une fois la « fraude » détectée, l'IP est retenue et des mails d'avertissement sont automatiquement envoyés à l'internaute, ainsi qu'une lettre recommandée si une première récidive est détectée. Ces données se basent sur l'adresse IP de la machine.

Ce qui a provoqué tous ce mouvement c'est qu'ensuite, si de manière automatisée il est détecté que l'internaute en question continue à télécharger illégalement, alors une autorité - l'Hadopi - indépendante de la justice et de l'Etat (qui n'a donc aucun légitimité) sera en mesure de prononcer une coupure d'accès Internet, et un « blacklistage » de l'internaute afin qu'il n'ait la possibilité de recontracter un abonnement chez un autre fournisseur. Cette action, prononcée par une autorité indépendante de la justice, pourra l'être sur simple preuve automatisée de la fraude (liée l'IP), l'accusé est donc présumé coupable, ce qui ne pose aucun problème en soi puisqu'il n'est pas ici question de justice.

Ainsi le problème actuellement reconnu comme majoritaire est celui du piratage de ligne : si le voisin de l'internaute lambda pirate sa ligne à des fins illégales et que cela est détecté par les systèmes de traque automatisée, alors la réponsabilité de l'internaute lambda (dont la ligne a été piratée) sera engagé, et il subira la sanction prononcée par l'Hadopi.


La solution au problème : surveillance ou espionnage ?

L'internaute lambda se fait accuser à tort... Même si l'Hadopi n'est pas censée représenter la justice, cela pose tout de même un léger problème d'éthique. À force, Albanel a donc réfléchi à une solution, cette solution vient d'elle-même finalement : puisque c'est l'Etat qui veut mettre en place l'Hadopi, l'Etat va aider l'internaute à ne pas se faire pirater.


Concrètement qu'est-ce que cela signifie ? Olivier Henrard, membre du cabinet de Christine Albanel, explique que des moyens fournis par l'Etat vont être mis en place pour permettre de "surveiller l'utilisation de la ligne" en "envoyant de manière régulière et dès qu'elle est utilisée, des informations sur son utilisation, et par qui".

Concrètement un systèmes de journalisation (« logs » dans le jargon) serait mise en place et permettrait de surveiller l'utilisation de la ligne pour détecter les piratages de ligne. En réalité le but semble être tout autre puisque normalement faite pour l'internaute, cette disposition aurait donc due être disponible sur demande mais il fut décidé qu'elle serait obligatoire, sans doute pour raisons d'économie de traîtement de dossier.

L'internaute refusant de mettre en place des protections fournies par l'Etat qui enverrait des informations sur toutes les activités de sa ligne à un système centralisé pourrait donc se voir sanctionné.

L'incident est une imprécision habituelle aux politiques sur la question des moyens à mettre en place : les informations envoyées n'ont pas été clairement définies, et leur destination et utilisations non plus.

Ainsi les associations de protections des libertés y voient tout de suite une tentative croissante de surveillance totale de l'Internet français, les foyers seraient ainsi obligés de mettre en place un système « d'espionnage » sur les ordinateurs connectés à internet, dans le but de ne pas être sanctionnés à tort, mais seraient alors sanctionnés s'il refusent de le faire : il semble alors que l'internaute est sanctionné dans les deux cas.

Quelques précisions encore incertaines sembleraient également aller dans le sens de supprimer uniquement la possibilité d'accéder à Internet, autrement dit la télévision par ADSL ainsi que le téléphone ne devraient normalement pas être affectés dans la mesure du possible (techniquement) (SIC). Autrement dit si la séparation n'est pas possible ou que l'ouvrier aux qualifications réduites (pour réduire le coût) envoyés chez vous pour vérifier la possibilité de séparation d'Internet et du reste n'en déduit pas que cela est possible, vous n'aurez plus non plus accès au téléphone et à la télévision : vous serez coupés de tout moyen de communication (cellulaire mis à part).

Une autre précision incertaine est celle des courriers électroniques, il serait peut-être imaginable d'après Albanel, de pouvoir consulter uniquement ses mails avec la connexion Internet, cela serait peut-être possible à mettre en place grâce à l'installation de systèmes de sécurité sur la machine hôte (encore un espion ?) et cela serait pour l'instant possible durant la durée de décision de l'Hadopi (pas prévue comme étant particulièrement longue).


Une faille



Pour finir, une question subsiste : quid des cellulaires et autre PDA qui permettent un accès à Internet haut débit où que l'on soit ? Bien que la plupart des opérateurs mobiles (Bouyges, SFR, Orange, Télé2, etc. ) soient maintenant également sur le marché des fournisseurs d'accès à internet, l'internaute dont l'accès à Internet est bloqué pourrait toujours rabattre ses dépenses sur un abonnement haut débit mobile et avec les capacités d'actions montantes tes téléphones mobiles et leur capacité de stockage, le même type d'actes risque d'être reproduit.


Un projet sur le chemin de l'application



Alors que ce projet « Créatons et Internet » avaient jusque-là été bloqué au niveau du Sénat avec de nombreux votes contre et pour les amendements, ainsi qu'un blocage au parlement Européen, Hadopi a passé le cap du Sénat vendredi dernier (31 octobre).

A ce stade le système français étant ce qu'il est il ne lui reste plus que l'Assemblée à passer pour une lecture unique et qui n'aura donc pas d'incidence réelle sur le projet de loi, ainsi que le Conseil Constitutionnel.

Le projet devrait normalement être lu par l'Assemblée en janvier, Albanel a donc quelques mois pour mettre le Conseil Constitutionnel dans sa poche mais cela ne semble pas l'effrayer le moins du monde.


Une affaire à suivre donc, mais qui est déjà terminée en grande partie.

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